Né à Madrid le 12 septembre 1942, Tomas Marco mène de front études musicales et universitaires, puisant en lui-même les ressources nécessaires à la conduite d'un double cursus. Tandis qu'il s'adonne au violon et à la composition, il étudie parallèlement la psychologie, la sociologie et le droit, pour lequel il est diplômé de l'Université de Madrid en 1964, sans que cela ne le détourne de ses appétences musicales. Présent aux concerts madrilènes où sont données en création les œuvres les plus novatrices, attentif aux débats et conférences portant sur la musique nouvelle, il suit en outre les cours de plusieurs professeurs prestigieux à l'étranger. Parmi eux, Pierre Boulez (avec lequel il effectue un stage à Bâle), Karlheinz Stockhausen (de qui il est l'assistant à Darmstadt), Bruno Maderna, György Ligeti ou encore Gottfried Michaël König, Lejaren Hiller et Théodore W. Adorno.
Les premières occurrences de Tomas Marco dans la sphère compositionnelle en 1958 marquent les débuts d’une longue série d’œuvres, desquelles émane dès 1967 une expression toute personnelle. Ce qui ne signifie pas, bien sûr, qu’il soit resté sourd aux sonorités contemporaines qui l’entourent. Outre l’influence qu’exerce sur lui l’école de Darmstadt – où Tomas Marco effectue du reste trois séjours (1962, 1965 et 1967) –, il faut compter par exemple sur son intérêt pour les compositeurs américains dans la mouvance de Cage. Ce dernier ne soutiendra-t-il pas d’ailleurs le groupe madrilène Zaj, qui a fait des musiques expérimentales et de la performance sa spécialité, et auquel Tomas Marco apportera lui-même son concours en comptant parmi les membres de cette formation ?
Ce qui ne fait pas de doute pour José Luis Garcia del Busto, rédacteur du texte de présentation liminaire du catalogue de Tomas Marco, c’est le caractère original de son langage musical, qui rend l’œuvre du compositeur « instantanément reconnaissable » et, pourrait-on ajouter, presque immédiatement reconnue. Dès 1969 en effet, son pays d’origine le met à l’honneur en lui décernant le prix national de musique pour Vitral, de même que la Fondation Gaudeamus, qui lui octroie par deux fois une récompense, en 1969 et en 1971. Également primé à la VIe Biennale de Paris pour Aura, il reçoit la Harpe d’or pour Autodafé (1975), le premier prix de la Tribune internationale des compositeurs de l’Unesco (1976) ainsi que de multiples gages d’admiration, venus d’Europe et d’ailleurs.
Non exempte d’un certain caractère espagnol, la musique de Tomas Marco emprunte à ses racines sans s’y abandonner totalement. C’est que le compositeur cherche, selon ses dires, à « capter » ce qui vient d’ailleurs, empruntant parfois à diverses esthétiques (le minimalisme, dans Rosa Rosae) à partir desquelles il fait son propre miel. Libre de toute attache vis-à-vis de la tradition, Tomas Marco définit son écriture comme « éclectique », n’hésitant pas, le cas échéant, à recourir à la citation (Concerto pour violoncelle, sur des thèmes de Manuel de Falla, 1976) pourvu que « les moyens d’écriture ou les esthétiques empruntées [soient] convertis en un langage personnel ». Quand d’aucuns évoquent ce recours à l’emprunt pour justifier l’expression de « nouvelle simplicité » appliquée très tôt à la musique de Tomas Marco, d’autres soulignent la facilité et la clarté qui ressortent de son travail. Un travail dans lequel la voix occupe par ailleurs une place privilégiée, qu’elle soit traitée instrumentalement ou sur le mode du sprechgesang, dont il favorise différentes approches.
Aussi importante soit la portée de ses compositions, l’influence de Tomas Marco sur la vie musicale en Espagne et à l’étranger ne s’arrête pas toutefois à ses seuls travaux compositionnels. Auteur de plusieurs livres et de nombreux articles, il joue également de sa plume en tant que critique musical pour diverses revues (SP, 1962 ; Informaciones, 1967 ; Arriba, 1971) et fonde, avec Ramón Barce, le magazine Sonda (1967). De 1970 à 1981, il est fonctionnaire de la Radio espagnole, au sein de laquelle il s’occupe essentiellement de musique contemporaine, avant d’être détaché de ses fonctions au profit de l’Orchestre national, dont il assure momentanément la gestion. En 1985 lui est confiée la direction du Centre de diffusion de la musique contemporaine, qui prend notamment en charge plusieurs séries de concerts chaque année et organise des cours, des stages et des conférences. Deux activités auxquelles Tomas Marco participe par ailleurs à titre personnel en tant qu’organisateur de concerts, conférencier et professeur pour l’Université nationale de l’éducation faite à distance (l’UNED, 1973-1976) ainsi que pour le Conservatoire supérieur de Madrid, où il enseigne les « techniques nouvelles ».